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Autumn Laing, roman

Alex Miller

Phébus

  • Conseillé par
    25 novembre 2013

    Une vie australe

    Quelque part dans la grande banlieue de Melbourne, une vieille femme passe ses journées recluse dans sa maison décrépie, seul témoin d’un temps révolu où le lieu était encore champêtre. Acariâtre, solitaire, elle attend la mort en prenant un malin plaisir à se montrer odieuse avec ceux qui osent l’approcher. Mais une jeune femme insiste pour la voir, la revoir, parler avec elle, et la supplie d’écrire ses mémoires. Car cette vieille femme n’est autre que la célèbre Autumn Laing. Lorsqu’elle était jeune, dans les années 30, Autumn a été la muse et la protectrice de plusieurs artistes, en particulier de celui qui allait devenir  un peintre particulièrement côté : Pat Donlon.

    Alors, de mauvaise grâce puis peu à peu emportée par ce qu’elle raconte, Autumn accepte de se souvenir. Issue d’un milieu bourgeois et conservateur, elle s’est mariée très jeune à un mécène éclairé et fou d’elle, Arthur Laing. Leur maison est vite devenue le refuge d’artistes bohèmes, et c’est ainsi qu’un jour Pat Donlon est apparu. Né dans une famille pauvre d’origine irlandaise, Pat était prêt à tout pour vivre de sa peinture. Le coup de foudre entre Autumn et Pat a été immédiat et leur passion dévastatrice. Le raisonnable Arthur, qui ne voulait pas renoncer à Autumn, les observait à distance.

    Mais l’arrivisme et l’ambition des hommes se jouent des passions amoureuses. Pour Autumn, l’évocation de Pat Donlon reste une fulgurante blessure, tant d’années après toujours déchirante. Comme si sa vie s’était terminée là.

    Alex Miller se glisse dans Autumn, met peu à peu au jour ses désirs, déconvenues, souffrances, secrets et regrets. Peu nombreux sont les auteurs capables de distiller ainsi le sentiment amoureux et d’atteindre l’être profond d’une femme. Cette Autumn âgée, qui regarde son passé sans complaisance mais avec une douleur infinie, est tout simplement inoubliable.

    Mais ce livre est bien plus que cela. Il nous plonge dans l’Australie des années 30, un pays encore archaïque et violent, où la population se classe selon ses origines mais où les paysages sauvages sont d’une incroyable beauté. En outre, cette communauté d’artistes bohèmes évoluant autour d’un couple de mécènes a été inspirée à Alex Miller par l’histoire bien réelle  du peintre Sidney Nolan et des collectionneurs d’art John et Sunday Reed. Dans les années 30, ceux-ci avaient racheté et transformé une ancienne ferme dans les environs de Melbourne en résidence d’artistes. Ils y ont invité de jeunes peintres d ’avant-garde qui ont constitué une école informelle, fondatrice de l’art moderne australien, appelée « groupe de Heide » du nom de la ferme des Reed.

    Le livre d’Alex Miller se fait le reflet de leurs enthousiasmes, leurs doutes, leurs désaccords et leurs prétentions esthétiques. Au fil des pages, leurs discussions tournent autour de sujets tels que la place que doit occuper l’art dans une vie, et sont portées par une même obsession : la nécessité de créer de toutes pièces un art australien qui ne soit pas la simple reproduction d’un courant importé d’Angleterre. Et c’est passionnant.

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