Lundi 14h - 19h

Mardi - Samedi : 10h - 12h30, 14h - 19h

 

 

 

 

  • Conseillé par
    26 juin 2013

    Il y a des livres qui vous touchent parce qu’ils vous renvoient à votre propre vécu ou à des gens proches. Des personnes issues d’un milieu modeste mais pour qui certaines valeurs étaient importantes. Souvent elles n’avaient pas appris à dire leurs sentiments, la pudeur était de vigueur. Pas d’effusion ou d’embrassade, on gardait ça en soi. Les joies comme les peines. Et un homme se devait d’être fort, surtout ne pas pleurer. Des taiseux dont des ruisseaux ou des torrents de larmes charriaient l’âme et le cœur traçant des sillons indélébiles enfouis. Mon père en faisait parti et Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il m’aimait.

    Nous sommes en 1961. Albert est ouvrier à l’usine Michelin . Après sa journée de travail, il aime retourner à ses racines, la terre transmise d’une génération à l’autre. De ses mains, la toucher et la cultiver. Son épouse Suzanne voudrait balayer le passé que le mobilier lui renvoie à la figure par le mobilier et être moderne. Depuis que leur fils aîné Henri est parti en Algérie pour la guerre, Suzanne a changé. Elle n’est pas devenue une des ces femmes qui portent sur elles la tristesse. Au contraire, elle prend spin comme jamais auparavant. Avec Henri, elle échange une correspondance unique. Pourtant Albert connait la guerre, il l'a faite. Et y a Gilles, le second fils arrivé tardivement qui s’échappe dans les livres. Albert sait qu’Henri est le fils préféré de Suzanne. Même si Albert est un taiseux, il veut que Gilles bien que différent ait sa chance lui aussi. Il le présente à Monsieur Antoine un ancien instituteur à la retraite amoureux des livres. Suzanne a acheté une télé car Henri a été filmé. C’est l’effervescence, la famille, les voisins et voisins se tiennent devant ce poste durant la soirée. Et Henri apparaît. Albert se tient éloigné, il comprend que Suzanne a besoin de revoir son fils et qu'il n' a plus sa place dans ce monde qu'il ne comprend plus.

    En une seule journée, on assiste à la naissance du projet d’Albert, à ce qu’il veut transmettre à Gilles, à l’adultère de Suzanne. En une journée, les valeurs, les non-dits prennent forme à demi-mots mais surtout par les comportements. Les relations au sein de cette famille sont admirablement décrites. J’ai retrouvé cette pudeur qu’évoquait Marie-Hélène Lafon, les classes sociales qu’Annie Ernaux décrivaient et dont on est prisonnier, la lecture qui peut changer une vie.

    Dès les premières lignes, j’ai été ferrée par la simplicité qu’à Jean-Luc Seigle de nous immiscer dans un drame. La vérité superbement cruelle m’a prise à la gorge et j'ai été bouleversée. Pas de grands mots mais une écriture sans fioriture qui colle aux personnages comme une seconde peau.