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La Mort et autres jours de fête

Marci VOGEL

Editions DO

  • Conseillé par (Libraire)
    3 juillet 2020

    La mort et autres jours de fête

    J’ai pris « La mort et autres jours de fête » –« Death and Other Holidays »– de Marci Vogel, avec la traduction de Marie Chabin, un peu au hasard.
    J’avais aimé cette quatrième de couverture énonçant « le récit d’une année dans la vie d’April, succession d’instantanés qui dessinent un portrait émouvant avec une lucidité sincère, tendre, joyeuse. »
    J’avais juste un peu d’hésitation avec ce mot « instantanés », ces textes courts qui s’enchaînent et peuvent parfois me couper dans l’élan à l’attachement, ou me laisser en suspens comme un exercice de style qui n’en resterait qu’à l’apparence.
    Et bien, JOIE, absolument pas, ce fut donc le bonheur littéraire d’une rencontre fortuite, comme je les aime.

    Nous sommes sur l’année 1998-99, avec ses quatre saisons. Toutefois nous sommes en Californie, la variation est légère entre la douceur automnale et la brume estivale.
    L’auteure donne son rythme dès ses premières lignes, avec ce « Clic-Clac » du premier chapitre: « (…) elle disait qu’elle avait peur de perdre la tête, la mémoire, peur d’être effacée, alors chaque jour elle photographie quelque chose. »
    Ce sont des moments d’une vie marquée par la disparition du beau-père: Wilson. Une mort qui fait écho à d’autres, une mort qui enclenche une résonance sensible pour April.

    C’est étonnamment doux comme lecture, peut-être parce que ces souvenirs peuvent toucher tout(e) à chacun(e). Marci Vogel fait dans le « visible », le « palpable », des scènes quotidiennes que l’on peut effleurer nous-même. C’est un parfum dont on se souvient, une vieille voiture qui garde le charme d’un non-évènement, un geste qui s’en vient pour combler le vide d’une présence, présence que l’on devine bienveillante.
    C’est un peu comme une boîte aux trésors cette « Mort et autres jours de fête », on tire un mot comme « Comptoir », « Le lit de la rivière », « Récolte », puis un lien s’opère, un chemin se prend. Il y a comme du courage à vivre sa vie, à tout embrasser, à tout reconsidérer, à avancer avec les joies et les pertes.

    April continue dans ce deuil, elle se souvient, retrouve ses ami(e)s, la famille, et dit l’hommage par une scène qui célèbre Wilson, mais qui célèbre surtout l’instant, le renouveau, ses faux-pas, ses interrogations, surtout ceux et celles qu’elle aime ou qu’elle a croisé un jour dans sa vie.
    J’ai pleuré d’émotion en lisant le chapitre intitulé « Le diagramme des chiens », j’ai admiré la beauté fragile d’un jardin, j’ai assisté à des rencontres et vu la renaissance d’April par ces petites choses du quotidien, l’ouverture du cœur en quelque sorte.

    Ce livre parle de la mort comme l’essence même de la vie; ces deux mots, « mort » et « vie », imbriqués l’un dans l’autre au sein d’un cycle qui ne s’interrompt que lorsque le souvenir n’est plus. Alors April se remémore, sans forcer, avec élégance et humanité.
    C’était vraiment beau de lire ce roman qui pourrait faire penser à une suite d’haïkus ou à des plans-séquences « à la » Terrence Malick.

    Cette histoire faussement fragmentée nous laisse l’espace pour approcher les personnages, leur donner forme et prendre en densité au fur et à mesure que l’on apprend à les re-connaître.

    J’ai donc humé l’air californien en écumant les chapitres, j’ai suivi les vagues émotives d’April, loin de tout pathos, j’ai surfé sur les évocations sensibles des personnages, puis j’ai vu April prendre la tangente sur l’échangeur vertigineux de la vie.

    Coup de ❤️ made in Life.

    Fanny